LE CINEMA SRILANKAIS
Ben que le cinéma srilankais soit apparu dès les années 1900, il reste un jeune cinéma. Il n’a pris son essor que dans les années 60. Ces thèmes concernent les relations familiales, l’avortement, et les années de conflits entre militaires et les forces armées rebelles du nord du pays. Son fondement repose sur la littérature cinghalaise. Le style est comparable à celui de son voisin du nord, le cinéma indien présentant beaucoup d’images admirables du paysage srilankais.
HISTORIQUE DU CINEMA SRILANKAIS
La première projection cinématographique a lieu en 1901. En 1947, le film réalisé par Jyothish Singh d’après pièce de théâtre à succès « Kadavunu Poronduva » (Broken Promise) marque le début du cinéma srilankais.
Deux après, « Amma » (Mother) du réalisateur Sirisena Wimalaweera, est la première tentative de créer des films basés sur la culture cinghalaise. En 1956, « Rekava » (La Ligne du destin) s’affranchit pour la première fois de la profonde influence des productions indiennes.
« Ran Muthu Doova » est le premier film en couleurs. Des centaines de films furent réalisés au Sri Lanka par la suite.
L’âge d’or du cinema srilankais
« Gamperaliya » (Changement au village, 1963),
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« Nidhanya » (Le Trésor, 1970)
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ou « Baddegame » (The Village in the Jungle, 1980)
ouvrent la voie à plusieurs générations de réalisateurs, dont Siri Gunasinghe. Historien, poète, critique et auteur, il est le réalisateur de « Sath Samudura » (Seven Seas, 1967), une docu-fiction sur une communauté de pêcheurs du Sud du Sri Lanka.
D’un même réalisme, « Thun Man Handiya » (Three Way Junction, 1970) reconstitue la vie à la ville comme à la campagne du Sri Lanka des années 1940 et 1950. Signé du poète et compositeur de célèbres chansons du Sri Lanka, Mahagama Sekera, ce film est une magnifique ode à l’art et à la vie.
En 1970, l’industrie cinématographique est placée sous le contrôle du State Film Corporation (future National Film Corporation). Cet organisme a pour vocation de préserver et développer l’industrie du 7e art au Sri Lanka, qui peine à s’imposer avec seulement 20% de parts de marché contre 80% de films étrangers (60% Tamoul, 10% Hindou, 10% Américain). La corporation réduit l’importation des films étrangers pour favoriser les productions locales. Entre 1972 et 1979, les entrées passent de 30 à 75 millions de spectateurs et la part de marché des films sri lankais frôle les 60 %. Cet incroyable succès incite les producteurs à donner leur chance à de jeunes talents comme Dharmasena Pathiraja, Dharmasiri Bandaranayake ou Vasantha Obeysekere.
Autodidacte et adepte du cinéma-manifeste de Godard ou de Mrinal Sen, Dharmasena Pathiraja réalise des brûlots politiques, en rupture avec tout ce qui avait pu se tourner jusque-là. Caméra à l’épaule, il n’hésite pas à tourner dans des quartiers populaires pour aborder des sujets tabous comme le chômage, le crime ou la prostitution et en donnant le rôle à des inconnus auxquels le jeune public puisse s’identifier. « Ahas Gawwa » (One League of Sky, 1974)
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et « Bambaru Avith » (The Wasps are Here, 1978) sont aujourd’hui considérés comme de rares témoignages d’une époque révolue.
Dharmasiri Bandaranayake et Vasantha Obeysekere creusent cette même veine socio-réaliste, mais avec des approches radicalement différentes. Le premier explore la place de l’homme face à la société en explosant structures narratives et temporelles, comme dans son incroyable « Hansa Vilak » (Swan Lake, 1980), qui relate la descente aux enfers d’un homme dont l’adultère a été rendu public.
Scénariste et assistant-réalisateur sur « Seven Seas »,
Vasantha Obeysekere s’empare de faits divers pour se jouer des attentes du public. « Dadayam » (« The Hunt , 1983) démarre comme l’énième mélodrame d’une fille de campagne abusée par un voyou de la ville, sauf qu’elle va répliquer lors d’un dénouement qui compte certainement parmi les séquences les plus marquantes de l’histoire du cinéma sri lankais.
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« Ponmani » (« Younger Sister », 1977), autre film de Dharmasena Pathiraja est un cas à part dans l’histoire du cinéma sri-lankais : c’est l’une des très rares productions tamoules tournées par un réalisateur cinghalais. La cavale de la jeune Ponmani avec son fiancé issu d’une caste inférieure ne brasse pas seulement des thématiques toujours actuelles, mais annonce surtout la terrible guerre civile entre forces gouvernementales et organisation séparatiste des Tigres tamouls, qui fera plus de 70 000 morts et plus de 140 000 portés disparus entre 1983 et 2009. Ponmani est un film d’autant plus nécessaire que la plupart des productions tamoules d’avant 1983 sont aujourd’hui réputées disparues.
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La crise du cinéma srilankais
La guerre n’est pas la seule cause de la crise cinématographique sri lankaise des années 1980. L’adoption d’une économie plus libérale, la levée des restrictions sur l’importation des films étrangers et des facilités de production provoquent un nombre record de films à envahir les écrans. Quantité n’équivaut pas forcément qualité et le public se lasse rapidement des films à formules tournés au rabais. Cette situation n’empêchera pourtant pas Sumitra Peries de continuer à tourner des chefs-d’œuvre.
Epouse de Lester James Peries, elle est la première femme à réaliser des films sri lankais au Sri Lanka, en signant coup sur coup les énormes succès « The Girls » en 1978 et « The River’s Edge » en 1980. Son magnifique « Sagara Jalaya Madi Hundawa Oba Handa » (Une lettre écrite dans le sable) truste l’amour du public et fait le tour du monde en 1988.
Les situations de crise engendrent souvent les meilleurs artistes. Le Sri Lanka ne déroge pas à la règle. Durant la sombre période des années 1990 émergent les réalisateurs parmi les plus importants de toute l’histoire du cinéma Sri Lankais. Si Prasanna Vithanage conquiert le circuit festivalier dès ses premiers films comme « Fire in Ice » (1992) et « Walls Within » (1997), c’est surtout sa trilogie antiguerre constituée de « Purahanda Kaluwara » (Death on Full Moon, 1997),
« Ira Mediyama » (August Sun, 2003)
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et « Oba Nethuwa Oba Ekka » (With You, Without You, 2012) qui connaîtra une consécration mondiale.
Son œuvre et son combat persistant contre la censure ouvriront la voie à d’autres talents d’exception comme Asoka Handagama et son « Me Mage Sandai » (This is My Moon, 2000) ou l’unique lauréat sri lankais de la Caméra d’Or au Festival de Cannes en 2005, Vimukthi Jayasundara avec son « Sulanga Pinisa » (La terre abandonnée).
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La situation actuelle
Le cinéma sri lankais n’est malheureusement pas prêt à renouer avec son âge d’or. La mainmise de quelques distributeurs opportunistes sur un petit réseau de salles insuffisamment équipées restreint la diffusion des films à petits budgets. La durée moyenne de sortie d’un métrage indépendant est de trois ans actuellement. La médiocre qualité des productions commerciales n’attire plus les foules.
Pourtant, le Sri Lanka regorge d’un incroyable vivier de jeunes talents, comme nous le prouvent des maîtres en devenir : Prasanna Jayakody dont « Sankara » (Introspection, 2006) compte certainement parmi les plus beaux films autour du bouddhisme (et de la tentation)
et
Sanjeewa Pushpakumara, dont les bouleversants « Flying Fish » (2011)
et « Burning Birds » (2016) lui promettent un bel avenir.