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Le Nanar de Septembre 2019 : "Supermen contre les Amazones

  • Mis à jour : 24 avril 2020

Suite au visionnage de l’excellent documentaire "Péplum : muscles, glaives et fantasmes" diffusé vendredi 26 mars qui m’a bien fait rire je vais vous envoyer lors des prochains mois une série de péplum tous plus nanars les uns que les autres.
Cinécandide

FICHE TECHNIQUE
Titre original : Superuomini, superdonne, superbotte
Réalisateur : Alfonso Brescia, (sous le pseudo de Al Bradley)
Année : 1975
Pays : Italie / Etats-Unis / Hong Kong
Genre : Kung-fu avec trampolines dans l’antiquité romaine (Catégorie : Péplum)
Durée : 1h35
Acteurs principaux : Aldo Canti (dit Nick Jordan), Mark Hannibal, Yueh Hua

AUTOUR DU FILM

Il y a des nanars qui synthétisent à eux seuls toute la démence d’une époque en réunissant en leur sein toutes les tares et toutes les modes du cinéma bis le plus outrancièrement barré. « Supermen contre Amazones » est de ceux-là, qui mélange avec frénésie les éléments les plus douteux de la pop culture des années 1970 pour constituer au final une sorte de manifeste des produits les plus dégénérés de Cinecittà. De quoi s’étonner que Quentin Tarantino n’ait pas projeté d’en faire un remake.

Ce film a comme particularité d’être une co-production italo-américano-hongkongaise, réunissant le pire de trois nations pour obtenir une tambouille immangeable par le commun des mortels, mais ô combien savoureuse pour l’amateur de nanars. Ovidio G. Assonitis, producteur grec actif dans le cinéma bis italien (il devait par la suite produire l’inqualifiable « Piranhas 2 : les tueurs volants », du débutant James Cameron), s’était associé pour l’occasion à la firme américaine AIP, monument de la série B, et à la Shaw Brothers, gloire du cinéma d’action de Hong Kong. Entre un Rastapopoulos du cinéma européen, un Américain grossiste en nazeries et un Chinois encore peu au fait de l’Occident, le mélange pouvait se révéler détonnant, pour peu qu’un authentique réalisateur nanar soit mis aux commandes du projet. Ce qui fut fait avec l’embauche d’Alfonso Brescia, dit Al Bradley, dit Al Bradly, qui avait déjà prouvé, avec « Les Amazones font l’Amour et la Guerre », qu’il n’avait ressuscité le péplum que pour mieux l’enterrer.

« Supermen contre Amazones » est d’ailleurs une quasi-suite des « Amazones font l’Amour… » car de nombreux éléments du scénario et de l’ambiance du précédent film s’y retrouvent : récit tournant autour des frasques d’une tribu d’Amazones dans une antiquité mal définie, mêmes décors, plusieurs acteurs en commun… Mais en matière de folie, « Supermen… » dépasse de très loin son prédécesseur.

Brescia semble en effet avoir voulu battre des records de puérilité mongoloïde, en ajoutant dans un désordre total des influences très diverses : un peu de blaxploitation, un peu de bruceploitation, quelques éléments du « Fantôme du Bengale », de l’humour et des bastons à la Terence Hill / Bud Spencer, le tout emballé dans une antiquité très approximative et vaguement relié à la série de films « Les Trois Fantastiques supermen ». Qualifier « Supermen contre Amazones » de péplum est en effet un pis-aller, tant le monde décrit par le film ressemble davantage à une BD de gare au scénario improvisé, dans le seul but d’aligner des gags à deux balles.


La reine des Amazones (Magda Konopka).


Ah qu’elles sont jolie les filles de Pompei, laï laï laï laï laï...

SYNOPSIS

Comme le précédent film de Brescia, « Supermen… » a comme point de départ les exactions d’une tribu d’Amazones, qui terrorise toute une région. Les villageois font appel à Darma (Aru dans la VO), un héros immortel qui protège leur terre depuis des générations. Ce qu’ils ignorent est que Darma n’est qu’un escroc : pas plus de héros immortel que de pâté en croûte, la défroque de ce justicier d’opérette est simplement passée de main en main, endossée au fil du temps par une succession de filous vivant sur la crédulité des paysans et leurs offrandes.


Euh, je vais voir ce que je peux faire...

Se faisant vieux, le Darma actuel se prépare à passer la main à son apprenti. Mais il est mortellement blessé par un coup de lance de la méchante reine des Amazones. Devenu le nouveau Darma, l’élève décide de partir en guerre contre les Amazones pour venger son maître, aider les villageois et accessoirement continuer à profiter de la combine


Notre héros.

Petite parenthèse pour préciser que l’interprète de Darma (le jeune) contribue largement à nanardiser l’ensemble. Nick Jordan, de son vrai nom Aldo Canti, était un cascadeur italien actif à Cinecittà, qui est progressivement devenu acteur : très athlétique, il exécute avec maestria des scènes d’action énergiques. Mais c’est comme acteur qu’il y a un léger hic : non content de ressembler à un gigolo douteux, Nick Jordan arbore en toutes circonstances le sourire crispé et chevalin le plus horripilant que l’on ait jamais vu sur le visage d’un jeune premier nanar ! Tout simplement terrifiant, une fois qu’on a repéré le truc. On dirait une hyène au rictus figé par un courant d’air.

Cherchant des alliés, notre héros va tomber sur deux guerriers itinérants, qui vont apporter au film un piment multiracial : Molosse, un grand Noir (Mug en VO, campé par l’Américain Mark Hannibal) et Chang, un Chinois qui, comme tout asiatique qui se respecte, pratique les arts martiaux (Yueh Hua, amené par la Shaw Brothers). Les deux futurs compères du héros se font remarquer en administrant des branlées à une bande de brigands débiles qui pensaient les détrousser, ce qui nous donne droit à de superbes bastons à la Bud Spencer. La scène où le Noir met les brigands en déroute dans une taverne vaut à elle seule le détour, puisque notre homme, qui vient de manger, met KO ses assaillants avec le seul souffle de son rot superpuissant ! Si, si, j’vous jure…

Iii-yaaaah !

Darma persuade Molosse et Chang de lui venir en aide contre les Amazones en leur promettant de leur révéler le secret de l’immortalité. Leur alliance étant scellée, le film va se poursuivre en une série de bagarres cartoonesques : les brigands reviennent tous les quarts d’heure pour se prendre une nouvelle branlée, nos héros prennent la tête des villageois contre les Amazones, et emballent chacun une jolie paysanne au passage (le Noir emballe une Noire et le Chinois emballe une Asiatique, faut pas non plus abuser : on ne sait d’ailleurs pas ce que font là ces filles de couleur au sein d’un village parfaitement européen…).

Le brigand et son sbire.

CRITIQUE

Complètement infantile et régressif, « Supermen contre Amazones » est une sorte de joyeux fourre-tout rempli de coups de poing qui font des bruits de ressort, de gags d’un niveau tarte à la crème, et surtout d’une pléiade de sauts en trampoline (exécutés par Nick Jordan), à rendre jaloux Cüneyt Arkin. A ce niveau, ce n’est plus un héros, c’est un pois sauteur !

Régulièrement, Nick se remet à nous terroriser avec son épouvantable sourire digne d’un vampire sous cocaïne, à croire que c’est la seule expression qu’on lui ait apprise en cours de comédie ! Si ses cascades ne boostaient pas le quota « action » du film, je serais tenté de voir en lui le pire jeune premier de toute l’histoire du cinéma bis italien.

Contrairement aux « Amazones font l’Amour et la Guerre », qui accusaient quelques longueurs, « Supermen contre Amazones » affiche fièrement un rythme assez trépidant durant les quatre cinquièmes du métrage : avec trois héros, l’action est pour ainsi dire multipliée par trois, et le fait que le film se veuille résolument rigolard aide largement à la détente du spectateur. On regrettera juste que, dans le dernier quart d’heure, Alfonso Brescia se mette d’un seul coup à se prendre au sérieux et nous inflige une bataille finale un peu longuette, filmée dans l’obscurité, et que quelques gags ne sauvent pas de la mollesse. Dommage !

Cela n’empêche pas le film de constituer un spectacle très réjouissant, que sa furieuse débilité élève par moments au rang de nanar d’élite. A croire que Brescia, conscient d’avoir tourné une ânerie avec son précédent film d’Amazones, a voulu à toute force s’auto-parodier. Le résultat vaut en tout cas le détour et offre, à force de bastons navrantes et de gags éculés, un magnifique exemple de cinéma bis italien à la bêtise décomplexée. Chaudement recommandé !